1. Il est un clair ruisseau
Protégé par des saules
Qui m'offrent leur rideau
D'ombre fraîche et de gaules.
Là, dans l'herbe et les joncs,
Vit la troupe maligne
Des frétillants goujons
Que je pêche à la ligne.
2. Là, je trouve un réduit
Inaccessible au monde,
Et mon heure s'enfuit
Au murmure de l'onde.
Là, j'ai la paix du coeur,
Mon potager, ma vigne
Et mon parfait pêcheur...
Car je pêche à la ligne.
3. Que d'autres, plus hardis
Et peut-être moins sages
Des océans maudits
Dépeuplent les rivages !
Pour être un gros pêcheur,
J'ai l'âme trop bénigne.
Leurs filets me font peur,
Moi, je pêche à la ligne.
4. Du choc des passions
Spectateur insensible,
Les révolutions
Me trouvent impassible
Rois fous, peuples légers,
Pour un mot, pour un signe,
Vous entr'égorgez...
Moi, je pêche à la ligne. [...]