1. Je suis fils du meunier du Rêve,
Le grand meunier des firmaments ;
Son vieux moulin tourne sans trêve
Pour moudre un à un vos tourments.
J’ai de beaux louis d’or en poche,
Chimère blonde entre mes doigts
Et, quand un créancier m’approche,
Je suis payer ce que je dois …
Je suis fils du meunier du Rêve.
2. Je fis l’école buissonnière
Où j’appris un tas de chansons ;
Ma jeunesse, peu prisonnière,
Courut avec les polissons.
Le latin qu’on enseigne en classe
Barricadait dans mon cerveau
Mon fol esprit ; de guerre lasse
En suivant le lit d’un ruisseau,
Je fis l’école buissonnière.
3. Un soir que je voulais la lune,
Père tout rouge se fâcha :
« J’aurais une monstre fortune
Que je n’en ferais pas l’achat ;
Fils dispendieux et sans cervelle,
Désormais sous un autre toit,
Tu peux allumer ta chandelle,
Qu’on ne me parle plus de toi ! »
Car j’avais demandé la lune.
4. Je n’ai chandelle ni demeure,
Ni cœur pour réchauffer le mien ;
Point de bouche qui rit ou pleure
A ma chanson, pas même un chien :
Car les chiens aboient à la lune
En s’accrochant à mes mollets …
Qu’elle est belle la blanche thune
Que Dieu jette par mes volets
Je n’ai chandelle ni demeure.