Percussions africaines, il n'y a pas que le djembé
31 octobre 2014
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Jean Baptiste
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Classe de 6ème. Une des première auditions que je propose dans l'année est un
ensemble de tambours Ingoma de Tanzanie, de longs instruments qui se jouent avec de rudimentaires mailloches. Vient le
moment de donner la parole aux élèves en les invitant à partager tout ce qu'ils souhaitent : les émotions, leurs impressions,
ce qui ont reconnu. 25 mains levées (en moyenne). J'interroge un premier élève au hasard : "- Oui ? - Y a du djembé !" Et les
24 autres de baisser la main en lâchant un "Oh...", sous-entendu "pourquoi ch'suis jamais interrogé. Moi aussi j'ai les bonnes
réponses". Je me contente d'un "Tu as reconnu du djembé, très bien. Comme nous ne sommes pas sûr qu'il s'agisse vraiment de
djembés, pour l'instant je te propose de parler de tambours.", mais en secret je me demande ce qui a bien pu porter le djembé
sur le devant de la scène à ce point pour qu'il eclipse tous les autres instruments à percussions africains pour devenir
synonyme même de tambour.
Organologie
Le djembé est un instrument traditionnel d'Afrique de l'Ouest (Sénégal, Côte d'Ivoire, Togo,
Guinée...) fait de deux blocs de bois superposés, sculptés de motifs, le premier conique et le second évasé sur lequel est
fixé une peau, généralement de chêvre, par un procédé de cordes tendues très précis, qui font que la membrane reste toujours
tendue. C'est principalement à cela, d'ailleurs que l'on reconnaît un djembé fabriqué de manière traditionnelle en Afrique d'un
jouet (quel que soit son prix). Sur une imitation, la peau finira toujours pas se détendre et on pourra jeter l'instrument
à la poubelle. Les véritables djembés sont des petites oeuvres d'art, tant au niveau du travail graphique que technique.
Un hasard
L'instrument est arrivé dans les bagages des migrants africains dans les années 80 (c'était plus
marginal avant ces années-là). Ils se sont retrouvés sur les marchés à des prix particulièrement attractifs et ce sont très bien
vendus. Un marché s'est créé. Des grossistes en djembé ont vus le jour et depuis, aucun africain de l'ouest n'envisagerait ne pas
proposer le djembé sur son étal. Dans les années 90, ils se sont déclinés dans tous les tailles, depuis le porte-clef jusqu'au
djembé basse et son cousin le dounoum, en passant par la taille enfant et la taille "200 euros, c'est un peu cher, on va en prendre
le modèle en dessous". Cette nouvelle gamme de produit sort bien sûr de la tradition mais pourquoi pas. D'autres vendeurs moins scrupuleux,
africains ou non, se sont mis à vendre des jouets fabriqués en Chine, sous la même appellation (non controllée) djembé à des tarifs à peine
inférieurs. En conséquence, au début des années 2000, quel foyer en France n'avait pas son djembé ? Dans l'appart' cool typique,
on trouve encore : un lit pas fait, un vieil électrophone et deux disques vinyls, une vieille guitare électrique avec son ampli en
panne, un didjeridoo et un djembé, c'est O-BLI-GA-TOIRE. Les tablas des parents, si eux-mêmes étaient cools, sont maintenant remisés
à la cave. Ceci dit sur le ton de l'humour mais cela ne me pose pas le moindre problème.
Et les autres tambours
D'accord pour avoir un djembé à la maison, c'est l'instrument qu'on trouve en bas de la rue, c'est facile,
c'est cool, pas trop cher, pourquoi se priver mais il faut bien garder en tête qu'il existe bien d'autres instruments à percussions en Afrique.
Depuis les tambours les plus simples, baguettes de bois sur bois creusé jusqu'aux plus complexes, à double peau, ce continent, qui s'est fait,
il est vrai, une spécialité de l'instrument à percussion, nous propose une gamme d'instruments gigantesque qu'il serait intéressant de commencer
à explorer.